Grossesse et Accouchement

La grossesse et l’accouchement…

     La grossesse est toujours une période à part dans la vie d’une femme. En effet, qu’elle soit désirée (80%) ou subie (20%), elle est une source de changements profonds pour la future mère. D’une part à travers les remaniements physiques d’un corps qui se transforme et se déforme, touchant directement à l’image que la femme a construit d’elle-même tout au long de son enfance, de son adolescence et de sa vie d’adulte. D’autre part à travers les remaniements psychologiques engendrés par son statut de « femme enceinte » qui modifie son rapport aux autres. Que son entourage et la société la mettent sous cloche et la sur-protégent, ou qu’ils la mettent au pilori pour une grossesse « honteuse », elle est dans tous les cas, mise à part du courant de la vie « normale ».

   Au sein même de sa famille et de son couple son statut change, puisque du statut de  « fille » , elle accède au statut de « mère », et que ce statut de mère doit apprendre à cohabiter avec celui d’épouse, d’amante, de femme.

  

Tous ces changements peuvent être vécus sereinement car annonciateurs du bébé à venir, la grossesse pouvant alors être vécue comme un moment à part de calme et de bonheur. Ces changements peuvent cependant aussi être source de stress et d’angoisse pour la future maman. Stress et angoisse pouvant influer sur le déroulement de la grossesse : nausées,  boulimie, insomnie, dépression, contractions, hyper tension, …   L’accouchement lui-même, terme inéluctable de ces neufs mois, et traditionnellement synonyme de douleur intense, de déchirure, est porteur d’une très forte charge émotionnelle.

   Ajoutons toutes les complications pouvant survenir pendant la grossesse ou l’accouchement : gémellarité, placenta recouvrant, éclampsie, présentation par le siège, dystocie cervicale …et pouvant chacune activer ou réactiver les angoisses de la future mère. Mais ceci n’étant pas un précis d’obstétrique je ne rentrerais pas dans le détail des pathologies multiples et variées pouvant se décompenser, se révéler ou survenir pendant une grossesse et un accouchement.  

   La responsabilité première du médecin, hypnothérapeute ou pas, est d’assurer le bon déroulement de la grossesse et de l’accouchement de sa patiente. A cette fin, il doit mettre en œuvre tous les moyens techniques et scientifiques à sa disposition. A l’ère du pet scan, de l’échographie tridimensionnelle et des tests sanguins, une prise en charge purement intellectuelle semble difficilement justifiable, même si la grossesse en question se présente sous les meilleurs auspices. Je ne rentrerai pas dans les détails techniques du suivi médical  d’une grossesse normale car ce n’est pas le propos. Il suffit de savoir que 10 à 20% des grossesses se compliquent, nécessitant dés lors des soins spécifiques. Il faut donc rester vigilant et savoir détecter une grossesse anormale .

     Dans tous les cas, le thérapeute doit respecter le contrat de soins passé avec sa patiente, et préserver son équilibre psychologique. 

 

Ceci étant posé, POURQUOI utiliser l'hypnose chez la femme enceinte ?

   Commençons par deux descriptions de grossesses et accouchements sous hypnose et développons …  en effet les dernières revues d’articles sur l’usage obstétrical de la transe hypnotique et de ses techniques dérivées confirment leur efficacité :

AVANTAGES :

INNOCUITE Comme on l’a vu précédemment, la transe hypnotique de par son caractère naturel et physiologique ne saurait présenter de risque pour le fœtus : aucune substance chimique n’est ingérée, inhalée ou injectée, aucune manipulation corporelle aussi bien intra qu’extra-utérine n’est réalisée.

CONFORT La transe hypnotique permet de soulager les « petits » maux de la grossesse, du type nausées matinales, lombalgies, troubles du sommeil et du transit.

SANTE Sur les « pathologies de la grossesse », elle facilite le traitement de l’hypertension gravidique en créant une détente et une relaxation de la patiente. Elle permet également d’aider à traiter une menace d’accouchement prématuré (augmentation significative du temps de gestation et du poids de naissance de l’enfant). Lors de l'accouchement, elle permet de diminuer le temps de travail, de diminuer les complications intercurrentes, et de raccourcir le temps d’hospitalisation.

CONFIANCE EN SOI  Lorsque le terme approche, la transe hypnotique est encore utilisable sous la forme d’une préparation à l’accouchement qui vise à aider la future mère à visualiser son corps, à en ressentir les réactions et à lui faire confiance en ce qui concerne sa capacité à gérer l’événement. Elle permet aussi de l’aider à se projeter dans son rôle de mère.

ANALGESIE ET ANESTHESIE Lors du travail, la transe hypnotique diminue le ressenti douloureux en favorisant la détente, en diminuant l’angoisse et l’appréhension, elle permet clairement de diminuer le recours aux analgésiques chimiques. La possibilité d’induire une hypno-analgésie complète lors du travail reste même entière selon les conditions du moment.

INCONVENIENTS :

ATTENTION FRAGILE ! On l’a vu cette période de la vie d’une femme est en elle-même source de grands changements physiques, à l’évidence, mais aussi psychiques. Du fait même que la grossesse est un temps de passage où se remanient les images, les souvenirs et le corps, c’est un moment où la femme vit une grande plasticité émotionnelle, et où, pour se construire « mère », elle puise dans son passé souvenirs, expériences et comportements.Quant à l’hypnose, elle est beaucoup plus qu’une technique d’analgésie ou de relaxation. C’est aussi une technique permettant d’exprimer l’inconscient, génératrice de changements, ce qui est d’ailleurs un de ses intérêts thérapeutiques. Le thérapeute travaillant en accompagnement de grossesse et d’accouchement doit donc rester particulièrement vigilant au respect de l’écosystème mental de la patiente, ainsi qu’à l’émergence de signes de conflits inconscients. Il doit être prêt à les prendre en charge si besoin en était, tout en restant très prudent dans son approche pour ne pas aller au-delà de la demande de la patiente. Elle ne cherche pas, a priori et dans la majorité des cas, à commencer une thérapie, brève ou longue. Elle cherche simplement une prise en charge de sa grossesse et de son accouchement. Ceci dit, les conflits inconscients activés, ou réactivés, à l’occasion de la grossesse, devront être pris en compte lors du suivi habituel.

100 FOIS SUR LE METIER … L’hypnose offre à la patiente différents outils lui permettant de gérer les nausées, le stress, les douleurs … mais, pour maîtriser pleinement ceux-ci, elle devra s’y exercer seule tous les jours. La plupart des personnes accèdent très facilement à l’auto hypnose et peuvent de se fait s’entraîner seules très vite. Cependant, certaines patientes ont besoin de temps et de beaucoup d’assistance rien que pour parvenir à entrer seules en transe hypnotique. Ces patientes demandent donc beaucoup de séances et beaucoup de disponibilité de la part du thérapeute.

AU CAS OU … Le père, la sœur, ou quel que soit l’accompagnant choisi par la patiente, peut tout à fait l’aider et la soutenir lors du travail. La présence d’un hypno-thérapeute confirmé reste cependant préférable en cas d’hypno-analgésie stricte ainsi qu’en cas de survenue de complications. Cette contrainte pourrrait être gérée en équipe, par une formation adéquate d’une ou plusieurs sage-femme pouvant intervenir en cas de besoin.

 

   Pour mieux conprendre, un peu d'histoire …


    Des nombreuses techniques utilisées depuis le début du siècle, on peut retirer trois points clefs : informer, rassurer et entraîner la patiente. Ceci reste valable même si la théorie de l’accouchement naturellement indolore qui servit de base à leur élaboration est aujourd’hui devenue obsolète. La contraction utérine prolongée et la dilatation du col sont naturellement douloureuses…

    Les recherches sur l'hypno-analgésie obstétricale ont commencé en France en 1887 avec Liébault et ses travaux sur l’analgésie psychologique, il est probablement le premier à avoir envisagé la possibilité d’une utilisation obstétricale de l’hypno-analgésie, du moins fut-il le premier à publier une étude consacrée à ce sujet.  Dans les années qui suivirent, le psychiatre viennois Kogerer reprit ces travaux, se concentrant sur les modalités pratiques de l’utilisation de l’hypno-analgésie en obstétrique. Ce précurseur évoqua même la possibilité de préparer la femme à l’accouchement dés le début de sa grossesse, afin de faciliter le travail et l’hypno-analgésie lorsque le moment sera venu. Il découla de ces recherches plusieurs techniques :

1913, Méthode de Read, obstétricien en Angleterre, qui développe une hypothèse dans laquelle la douleur pourrait ne pas être utile au bon déroulement de la naissance, voire même être source de complications. Cette douleur « anormale », s’expliquerait par le fait que les femmes accouchent dans la peur, créant une tension et une contraction corporelle au moment même où, justement le corps de la femme devrait se détendre pour laisser passer l’enfant. Cette contraction anormale se traduit alors par une douleur. Pour lui, si on élimine la peur, la douleur de l’accouchement disparaîtra spontanément.

1930, Méthode psychoprophylactique, développée en U.R.S.S. par Velvoski qui pense que l’hypno-analgésie est sous-tendue par des mécanismes de type réflexe conditionné. Pour lui, un bon entraînement permet de créer un réflexe permettant de retrouver à volonté une analgésie, et ce indépendamment des circonstances extérieures. L ’entraînement à l’hypno-analgésie est renforcé par des cours destinés à informer la future mère sur les processus anatomo-physiologiques normaux lors de l’accouchement, le tout dans une ambiance calme et rassurante.

1951, Méthode Lamaze, obstétricien en France, et qui, ayant assisté à un accouchement naturel sans douleur en U.R.S.S., élabore une théorie selon laquelle l’accouchement naturel est indolore, et qu’il suffirait de déconditionner les femmes pour qu’elles retrouvent l’usage des capacités d’analgésie naturelles du corps humain. Ses travaux reposent sur trois conditions essentielles : les normes d’un accouchement naturel, exempt de toute complication; un entraînement régulier sous contrôle médical; l’éducation et l’information de la patiente, permettant de faire disparaître le vieux réflexe conditionné qui lie l’accouchement à la douleur. La réussite de sa préparation sera telle qu’elle sera largement répercutée par les média de l’époque, elle débouchera sur la notion d’Accouchement Sans Douleur (ASD) qui justifiera que l’Assemblée Nationale adopte, le 1er juillet 1956, le projet de remboursement des séances préparatoires à l’Accouchement Sans Douleur. 


   Concrètement …

    Des différentes méthodes qui furent essayées, developpées ou étudiées, nous retenons aujourd’hui celles qui perdurent encore aujourd’hui, modifiées, adaptées à de nouveaux thérapeutes, de nouvelles équipes.

Training Autogène de Schultz.  

Psychiatre né en Basse Saxe en 1884, Schultz utilise et étudie l’hypnose. Pour lui, le sujet en transe vit une déconnexion sensorielle en ce sens qu’il réagit moins aux stimuli extérieurs tout en devenant extrêmement sensibles aux stimuli intérieurs. Au cours de ses recherches, il en vient à développer une technique permettant à tout un chacun de mettre son corps et son esprit au repos grâce à des exercices physiologiques déterminés (sensation de lourdeur, de chaleur, …).  Malgré ses insuffisances et ses erreurs, sa technique de relaxation par auto-décontraction concentrative sera vite diffusée et enseignée car elle reste une façon simple d’apprendre l’auto hypnose.

Sophrologie et Sophro-prophylaxie obstétricale

Au milieu du vingtième siècle, Alphonso Caycedo (1932) est psychiatre, il utilise et étudie l’hypnose, et les courants de pensées orientales. Il étudie particulièrement la conscience humaine et ses modifications par des moyens physiques et psychologiques. Au fil de ses travaux, il en vient à définir différents degrés de relaxation qui permettent la connaissance du corps, en réception autant qu’en représentation, inspirés des techniques yogiques de relaxation concentrative; des techniques bouddhistes de relaxation contemplative; des techniques zen, de relaxation réflective.

Hypobirthing (Hypnonaissance)

Développée outre-atlantique par Marie Mongan dans les années 1990, en prenant pour base la méthode de Read. Cette technique est basée sur l’hypothèse que l’esprit prime sur le corps, et que par conséquent ce que l’esprit croit le corps le réalise. La femme étant persuadée que la douleur n’existe pas, elle accouche sans ressentir de douleur puisqu’elle croit que la douleur n’est qu’une création de cerveau, sans support physique réel.